Août042024

Interpelle : plaisir d'offrir / joie de recevoir

J’aime bien cette grande maison. Mon bureau est au deuxième, au-dessus de la p’tite salle de consult. La verte. Il est tout petit et je le partage avec ma collègue et ma stagiaire. Les portes sont ouvertes, comme souvent, et comme celles des bureaux d’à côté où s’entassent d’autres collègues avec d’autres stagiaires. Ça circule comme dans un open space. Mais en petit. Et en fermé. Avec des murs en pierres, des poutres au plafond et une salle de bain avec baignoire s’il-vous-plaît. Donc c’est un peu différent. 

On est en train de bosser. On est à fond. On est motivés. C’est convivial, c’est chaleureux. En ce moment, on est plusieurs à plancher sur un projet de recherche qui concerne les habiletés sociales. A cette époque, je savais pas que 15 ans plus tard, je me poserai encore tout un tas de questions à ce sujet et particulièrement à propos des miennes…

 

Mon portable sonne. Je décroche. Un homme me demande si le tractopelle est toujours en vente. J’explique qu’il a dû se tromper de numéro et je raccroche rapido. Je vois que j’ai un message également, que je m’empresse d’écouter : bonhomme différent, même demande… Je commence à flairer le canular de copains adeptes de ce genre de blagues. J’ai une hésitation sur la personne. Ce serait plutôt le propriétaire d’ « arrête de chiper Shipper » le shetland ou bien son acolyte « regarde sous ma langue » ? De toute façon, si c’est pas l’un, c’est l’autre… Et peut-être même un complot des deux ! Qu’est-ce qu’ils vont pas inventer comme conneries !!! Y a pas longtemps, l’un a usurpé mon identité pour annoncer une grossesse à tous mes proches, et moins proches aussi d’ailleurs, l’autre a transformé mon pommeau de douche en machine à soupe pour rincer mon frangin au bouillon knorr…

Bref, j’en suis là de mes investigations et noeuds au cerveau quand je reçois un autre appel du même style où je demande un peu plus d’explications cette fois : « Mais vous êtes la troisième personne qui m’appelle pour un tractopelle, pouvez-vous m’en dire un peu plus ? » C’est le monde à l’envers ! 

Il y aurait donc une annonce très très sérieuse sur un site très très spécialisé, avec un très très beau tractopelle à vendre depuis ce matin, avec mon très très personnel numéro de téléphone… Les collègues qui se bidonnent en profitent pour passer leur petit coup de fil également pour avoir leur chance d’obtenir ce fameux engin. 

Ça me fait bien rigoler aussi. Et le soir j’appelle mes deux crétins de copains. « Bravo. Très réussi! Maintenant on arrête, parce que c’est relou et qu’il y a plein de monde qui cherche à acquérir un tractopelle apparemment. ». Ça vient pas d’eux. Mais ils sont jaloux. Ils trouvent l’idée formidable. 

Quelques jours plus tard, ça me fait moins marrer. Les potentiels acquéreurs de tractopelle sont matinaux ! Marre des coups de fil entre 5 et 6h du mat’ !

 

Et c’est comme ça que pendant des années je me suis retrouvée avec un mensonge éhonté comme message d’accueil sur mon répondeur : 

« Si vous appelez pour le tractopelle, il est vendu ! ».

 

N’empêche, je suis allée voir l’annonce. J’aurais bien aimé avoir un tractopelle. D’abord, parce que ça vaut son pesant d’or cette affaire-là ! Ça ferait pas de mal d’en avoir un en stock à fourguer. Et puis aussi parce que, dans ma réflexion de reconversion professionnelle, pour notre projet d’entreprise de livraison de coups de pelle, ça aurait été drôlement classe d’avoir un éventail allant de la pelle à sel jusqu’au tractopelle… 

Je suis pas sûre que la livraison de coups de pelle puisse faire partie d’un protocole de recherche basé sur les habiletés sociales par contre… 

 

Je suis pas sûre non plus que bosser sur les habiletés sociales pendant plus de 15 ans ait amélioré les miennes… 

Y a encore du taf...